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Hepheka – Apsiac – Epfig

Du Xe-XIe siècle à la Révolution, les évêques de Strasbourg furent les princes d’Epfig. 

La première fois apparaît dans un acte écrit, c’est en 763 sous le nom d’Hepheka. L’évêque de Strasbourg Heddo dota le monastère d’Ettenheimmünster de plusieurs églises : l’une d’entre elles est située dans « la villa Hepheka au-delà du Rhin en l’honneur de la Bienheureuse Vierge Marie ».

En 866, une charte signée par Lothaire II, roi de Lorraine, confirme les privilèges octroyés par Charlemagne au monastère de Lièpvre. Elle se termine par : « Fait à Apsiac, villa royale ».

Il y aurait donc eu une villa royale à Epfig à cette époque. C’était une grande ferme, des terres et une maison de plaisance, plutôt somptueuse. On parle même d’un palais royal : on a retrouvé dans les fondations de l’ancien château des morceaux de magnifiques colonnes sculptées qu’on lui attribue.

Des traces d’une villa romaine furent mises à jour entre 1907 et 1920 non loin de la gare, rue Finkwiller. Il s’agit d’une vaste salle de 8 mètres sur 15.

On a découvert aussi des conduites d’eau de 12 centimètres de diamètre intérieur, des ossements d’animaux, une fiole en verre, des clous et des pointes, des outils en fer et des tessons de poterie ordinaire et de terre sigillée datés du IIe au IIIe siècle avant Jésus-Christ.

En 1912, on a retrouvé dans une tuilerie, rue Finkwiller, une aiguière de bronze dont l’anse se terminait par un pied humain. 

Les travaux à la tuilerie ont révélé des caves néolithiques, de forme conique d’environ un mètre de diamètre, datant de 2 500 ans avant notre ère. Ces caves servaient à la conservation du feu, on y gardait les provisions et c’était un lieu de sépulture. 

En 1938, deux tronçons de voies romaines furent repérés au lieudit « Neugraben » : elles pourraient faire partie de la « Obere Kaiserstrasse ».

De 866 au Xe et XIe siècle, Epfig n’est plus apparu dans les écrits. Puis des empereurs allemands ont fait d’Epfig une possession de l’évêque de Strasbourg. En 1125, l’évêque Cunon von Michelsbach, alors retiré dans sa propriété épiscopale d’Epfig, a jeté les fondements du monastère de Baumgarten sur les terres du district de Dambach-la-Ville et d’Epfig.

A la fin du XIIe siècle, la qualité de « terre épiscopale » d’Epfig lui vaut un premier désastre. En 1199, pour se venger de Conrad de Hunenbourg (évêque de Strasbourg), Philippe s’est emparé du château d’Epfig et a ravagé la campagne et le village : c’était au temps des moissons que le château fut ruiné. Les annales de Marbach parlent alors de la prise du « cymiterium » d’Epfig ou encore d’un « castrum » (dans la chronique d’Ursberg). Cimetière fortifié ou château ? Dans tous les documents anciens, la double appellation est constante. En 1425, l’évêque cédait à Epfig « dominum sitam in medio castri seu cemyterii », une maison située au milieu du château ou cimetière.

Le terme « cimetière » ne désigne pas seulement un lieu de sépulture, mais un lieu fortifié, où se trouvaient aussi l’église, les bâtiments de l’administration et le palais épiscopal, la grange dîmière, des maisons pour loger les chevaliers attachés à sa défense et différentes constructions accessoires. En-dehors des « vraies guerres » entre seigneurs, les villages ouverts étaient souvent attaqués par des bandes de pilleurs et d’incendiaires. Les paysans avaient besoin d’un lieu fortifié près de leurs maisons pour se protéger. L’église et le cimetière ont donc été fortifiés car c’est là que se déroulait la vie sociale. Un dénombrement de 1384 dit : « Ein Kirchhoff ist ein Burg mit allem Begriffe ».

Dès 1375, Jean d’Ochsenstein, doyen de la cathédrale de Strasbourg, s’empare du château du cimetière d’Epfig et massacre ses habitants. Mais la tour lui résiste, ce qui permet aux troupes de l’évêque de reprendre la place.

En 1444, les Armagnacs terrorisent le centre de l’Alsace et brûlent Epfig.

En 1525, c’est la guerre des Paysans. Les bandes guerrières « Bundschuh » s’emparent de Dambach-la-Ville et d’Epfig, mais ils sont battus près de Scherwiller au cours d’une bataille sanglante.

En 1592, c’est la guerre des évêques, le « Bischofskrieg ». Une fois de plus, Epfig est presqu’entièrement brûlés et une partie de ses habitants massacrée.

En 1632, le château est pris par les Suédois et incendié en 1633 pour éviter qu’il ne soit investi par les habitants du Val de Villé afin d’en faire leur point d’appui stratégique. De nouveau le village est incendié et partiellement détruit.

Vue du château et de l’ancienne église d’Epfig. Photo Bernard Couturier

Maquette du château du début du 20e siecle par Frantz d’après les indications de l’abbé Rottmann. Photo Jean-Claude Stamm

Maquette du château du début du 20e siecle par Frantz d’après les indications de l’abbé Rottmann. Photo Jean-Claude Stamm

Le château était l’enjeu de toutes les batailles, seul refuge valable, le village n’étant pas fortifié. Lors de chaque attaque, les Epfigeois terrorisés affluaient au château pour sauver leur vie et quelques maigres biens.

Le cimetière fortifié s’étendait sur une quarantaine d’ares. Actuellement il ne reste plus qu’un moignon de la tour, à peine trois mètres de haut, de ce que l’on appelle malgré tout le donjon. Dans les années 1960, la tour devenait dangereuse à cause de nombreuses pierres qui se déchaussaient. Le conseil municipal de l’époque a opté pour sa démolition.

A la fin du XVIIe siècle il ne subsiste plus qu’un château, reconstruit après le rattachement de l’Alsace à la France par le cardinal Rohan, pour en faire sa résidence d’été. Il a ensuite été racheté par la commune pour servir de presbytère pendant une bonne centaine d’années.

La dernière occupation militaire du château date de 1675, époque à laquelle il reçut une garnison de dragons impériaux.

La lignée des nobles d’Epfig (« von Eppfich ») apparut durant la première moitié du XIIe siècle et s’est fondue peu à peu dans la noblesse. Ils furent établis au château d’Epfig et en avaient vraisemblablement la garde. Beaucoup de von Eppfich sont chevaliers et leurs lignées se sont ramifiées à travers toute l’Alsace. Ils s’éteignirent vers la fin du XVe siècle.